Michel Serres est un magnifique silène. Il est doté d'une belle âme, et, en outre, ce qui ne gâche rien, « d'une gueule » ; la nature a là aussi bien oeuvré.
C'est un silène aussi beau dedans que dehors. C'est un esprit vif et libre. Les trompettes de la renommée ne l'ont pas encore trop embouché, malgré les sollicitations et il sait encore prendre les chemins de traverse, prendre l'école buissonnière pour continuer à penser librement et rester sourd aux discours convenus. Autrement dit, continué par moment à déranger.
C'est un beau penseur qui suit son âme vertueuse, il est digne et sage. Il sait rester éthique sans être moral, au sens de donner la leçon...
Philosophe et homme de science, c'est un observateur avisé de notre monde moderne. Il est plus un guide qu'un maître. Il laisse la maîtrise à l'autre, qui seul doit prendre le chemin qui lui convient. Il indique différents chemins qui tous mènent quelque part. Pas d'impasse mais des passages. Michel Serres est un passeur, un accompagnateur, un éducateur… pas un formateur, chaque homme doit être son propre sculpteur.
Et maintenant, quelques perles rares de Michel Serres :
« La culture protège seul de la sénilité, produite, au contraire, par l'absence d'exercice intellectuel. Efficace et gratuit, ce dernier moyen de conserver le dynamisme juvénile reste, ô surprise, inconnu. Ami médecin, prescrits-tu à tes patients quelque page difficile assaisonnée de raisonnement comme remède à la débilité ambiante qui nous menace tous, toi comme moi, du vieillissement foudroyant ? »
Michel Serres, « Variation sur le corps, Editions Le Pommier, 1999, page 98.
« La sensation, gratuite, ne se paie en aucune monnaie. Ne la nommez jamais donnée : nul n'a obligation d'un contre-don. Ne l'appelez pas perception : qui joue, ici, le rôle du contribuable et le contre-rôle de l'imposteur ? »
D’autres à venir…
Licencié en mathématiques, agrégé de philosophie, docteur en lettres, professeur d'université, académicien ... et tintinologue. Observateur lucide de la nature humaine et de la "farce bouffonne" que l'on appelle la société. On ne présente plus Michel Serres, On connaît moins sa passion pour Hergé, cet "grand homme doux", le "Jules Verne des sciences humaines" ...
Rédigé par : ccil | 02/03/2005 à 17:21