Reconnaissance et redistribution
Aujourd’hui la justice requiert à la fois la reconnaissance et la redistribution qui combine le meilleur de la politique de reconnaissance et le meilleur de la politique de redistribution.
Les luttes pour la reconnaissance prennent place dans un monde où les inégalités matérielles accentuent tant sur le plan des revenus et de la propriété que sur le plan de l’accès à l’emploi, à l’éducation, aux soins de santé aux loisirs. Et, d’une façon plus dramatique encore dans l’apport calorique ou l’exposition à la pollution environnementale, avec des conséquences sur l’espérance de vie et sur les taux de morbidité et de mortalité. Les inégalités matérielles s’accroissent dans la plupart des pays, aux États-Unis comme à Haïti, en Suède comme en Inde, en Russie comme au Brésil. Elles s’accroissent également à l’échelle mondiale, principalement entre les pays du Nord et les pays du Sud.
De quelle reconnaissance s’agit-il ? Qu’entend-on par redistribution ?
Reconnaissance/redistribution : des mots aux concepts, aux paradigmes et de l’histoire au dilemme. Voici l’étymologie du mot reconnaissance : 1538; reconissance « gratitude » 1180; reconuisance « signe de ralliement » 1080; de reconnaître. Par définition , la reconnaissance et le fait de reconnaître, d’identifier un être comme tel ; ce qui sert à reconnaître. C’est l’acte de juger qu’un objet ou quelqu’un était reconnu ; c’est un acte d’identification. Sur le plan psychologique : c’est un processus par lequel une représentation mentale actuelle est reconnue comme trace du passé. Au XVIIe siècle le terme s’enrichit : la reconnaissance est le fait de se reconnaître, de s’identifier mutuellement. La reconnaissance est aussi l’action d’accepter, d’admettre. C’est le fait d’admettre après avoir nié ou avoir douté : la reconnaissance d’une qualité chez quelqu’un. Au XVIIIe siècle le terme de reconnaissance prend une dimension formelle juridique : reconnaissance d’un État, reconnaissance le gouvernement ou encore la reconnaissance d’utilité publique dont bénéficie une association, une fondation privée. Pour terminer cette définition cette citation de Jean-Jacques Rousseau : « la reconnaissance est bien un devoir qui faut rendre, mais n’ont pas un droit qu’on puisse exiger ».
Une remarque encore la reconnaissance rend ce qu’elle doit, elle s’acquitte. La gratitude ne compte pas ce qu’elle rend, elle doit toujours. La reconnaissance et la soumission devoir, on le remplit. La gratitude et l’amour de ce devoir, on n’en a jamais assez fait.
Le mot distribution renvoie au mot partage, répartition. Répartition à des personnes ; il renvoie aussi au mot service. En termes économiques la distribution et l’ensemble des conditions suivant lesquelles a lieu la répartition des richesses entre les membres de la société. Il est intéressant de noter que le contraire de distribution, répartition est ramassage, rassemblement. Le préfixe dis – vient du préfixe latin dis – il évoque généralement la séparation, l’indifférence ou l’absence.
Le paradigme de la redistribution ne repose pas seulement sur une problématique économique classique de type New Deal, social-démocratie ou socialiste. La redistribution comprend également toutes les formes de féminisme est antiracisme qui cherche les transformations que les réformes sociaux économiques un remède aux injustices de genre, d’ethnie ou de « race ».
Le paradigme de la reconnaissance est plus vaste que la réévaluation des identités injustement dépréciées : il va au-delà du féminisme culturel, du nationalisme culturel noir ou du mouvement identitaire gay. Il recouvre aussi des tendances déconstructivistes : le paradigme de reconnaissance déborde les frontières traditionnelles de la politique de l'identité.
Au sein du paradigme de redistribution le remède est la restructuration économique : redistribution des revenus, réorganisation de la médecine du travail… Au sein du paradigme de la reconnaissance le remède est le changement symbolique ou culturel : revalorisation des identités méprisées, de la diversité culturelle…
De l’injustice à la justice sociale : vaincre l’injustice requiert à la fois une politique de redistribution et de reconnaissance. Il faut examiner les axes de la justice sociale simultanément et comme des axes qui se chevauchent. L’homosexuel ou l’ouvrier a autant besoin de redistribution que de reconnaissance. L’injustice associée la reconnaissance est le déni de reconnaissance. L’injustice correspond à la distribution et la distribution inique ; les structures économiques, le régime de propriété et les marchés du travail privent les acteurs des ressources nécessaires à une pleine participation.
Etre un homme ou une femme, être blanc ou noir, être hétérosexuel ou homosexuel, être français ou étranger … impact sur la redistribution et représente – bien au-delà des injustices sociales de classe classique - selon le genre, « race » sexualité et nationalité un handicap économique systématique.
La distribution est une dimension fondamentale de la justice. Elle ne peut être réduite un épiphénomène de la reconnaissance. La redistribution est un aspect indispensable au changement social. Tout comme la redistribution, la reconnaissance est une dimension fondamentale de la justice sociale.
Repenser l’espace public : l’inégalité sociale corrompt le débat public. L’inégalité affecte les relations entre « les publics », qui sont segmentés et ont un pouvoir très différent les uns des autres ; les intérêts « privés » limite l’espace public et de ce fait alimente l’inégalité sociale. Enfin et surtout : plus l’espace public est faible moins la démocratie peut se ressourcer et se renforcer.
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